Archive pour mars 2010
Nouveaux textes de Bakounine sur la toile
On trouve désormais sur wikisource les six volumes d’Œuvres qui avaient paru entre 1907 et 1913 chez Stock. Depuis, seuls les deux premiers volumes avaient été réédités par le même éditeur. C’est donc une avancée considérable dans la mise à disposition du public de ceux des écrits de Bakounine qui sont dans le domaine public.Seule petite erreur: il s’agit bien des Œuvres, et non des Œuvres complètes, comme l’indique à tort la page dont j’ai fourni le lien.
De fait, les six volumes qui viennent d’être mis en ligne sur wikisource étaient déjà disponibles sur le site archive.org. Toutefois, sur ce dernier, la recherche lexicale dans les textes devaient faire avec les aléas de la numérisation à la sauce google: numérisation rapide, qui permet de mettre en ligne d’une manière massive, mais s’accompagne de failles plus importante dans la reconnaissance de caractères que, par exemple, le portail gallica de la Bibliothèque Nationale de France, de sorte qu’au moins un mot sur dix est mal reconnu, ou n’est pas reconnu du tout.
Nicolas Stankevitch vu par Bakounine
Trente ans après la mort de Nicolas Stankevitch, dont j’ai évoqué la figure dans le précédent billet, Bakounine, dans une note de L’empire knouto-germanique et la révolution sociale (1870-71), lui rend hommage comme à son créateur. C’est à ce texte (qu’on trouve dans le volume VIII des Œuvres complètes chez Champ Libre, p. 275-277) que je souhaiterais consacrer le présent billet, car il regorge d’indications intéressantes.
C’est tout d’abord le contexte dans lequel apparaît le nom de Stankevitch qui me semble devoir être signalé. Il s’agit d’une note de plusieurs pages (comme ce manuscrit en comporte tant…), tissé de réminiscences hégéliennes, que Bakounine ajoute au corps de son texte pour rendre compte d’une thèse qu’il défend, selon laquelle « chaque chose n’est réelle qu’en tant qu’elle se manifeste, qu’elle agit ». C’est d’ailleurs sans doute la coloration hégélienne de cette thèse qui va conduire à la convocation de la figure de Stankevitch. Ce dernier, qui n’a laissé derrière lui aucune œuvre, pourrait alors apparaître comme un contre-exemple : voilà en effet un homme dont chacun s’accorde à reconnaître la richesse intérieure, mais qui n’est pas parvenu à exprimer cette dernière dans une œuvre. Une objection semble venir aussitôt, c’est qu’il y aurait des génies méconnus, qui n’auraient pas manifesté leur richesse intérieure alors que celle-ci est pourtant bien réelle. La réponse de Bakounine est la suivante :
Bakounine et le cercle de Stankevitch
Entre 1836 et 1840, Bakounine fut membre d’un cénacle qui eut une importance particulière dans le développement des idées philosophiques en Russie. Ce cénacle est connu sous le nom de Cercle de Stankevitch, du nom de celui qui en fut le centre et l’inspirateur, avant de devenir, après sa mort en 1840 à l’âge de 27 ans, un objet de dévotion pour ses amis. On dispose sur ce cercle littéraire et philosophique d’un ouvrage de référence, celui de Edward J. Brown, Stankevich and His Moscow Circle, Stanford University Press, 1966, dont on peut lire des extraits sur Internet.
Comme on l’a rappelé dans un précédent billet, à l’époque où il participe aux activités de ce petit groupe au fonctionnement informel, qui lit pour l’essentiel de la littérature et de la philosophie allemandes, Bakounine n’est pas politisé, mais c’est le cas de tous les membres du groupe, qui ne vont mobiliser leurs lectures que pour penser les relations qu’ils entretiennent avec leur entourage, au sein du groupe et au dehors.