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Les incendiaires de l’imaginaire
Belphégor Littérature Populaire et Culture Médiatique, Vol. 1 No. 1, Novembre 2001

Les incendiaires de l’imaginaire.
Textes réunis par Alain Pessin et Mimmo Pucciarelli
Atelier de création libertaire. Lyon, 2000. p. 337.

Ce volume réunit les communications présentées lors d’un colloque international, tenu à Grenoble en 1998, portant sur les mécanismes de l’imaginaire, « cette activité par laquelle les sociétés se construisent, puis se remettent en cause, sont bouleversées par leurs propres intuitions et par les formes artistiques, littéraires, philosophiques, politiques et autres qu’elles découvrent en elles-mêmes. » Quoique l’intention de la rencontre n’ait donc pas été exclusivement littéraire, un grand nombre des textes offerts ici privilégient l’étude d’auteurs dont le rôle d’« incendiaire » est avéré et accepté, de Kafka à Sade, de Buñuel à Julio Cortazar, avec un détour obligé par Jules Verne (l’éternelle question : « Verne était-il anarchiste ? » n’y trouve d’ailleurs malheureusement pas de réponse autre que celle que Chesneaux lui avait déjà donné il y a plusieurs décennies). Rien donc, en apparence, ne devrait recommander particulièrement ce recueil aux étudiants de littérature populaire et de culture médiatique, si ce n’est pour une exception de taille : l’article« "Dynamique de la rêverie politique" », par Alain Pessin.

Dans cette réflexion l’auteur, sur la lignée du travail commencé avec son livre La rêverie anarchiste et continué depuis dans de nombreuses études, esquisse une série de relations entre mythe, idéologie et rêverie, entendue comme un état de disponibilité au « vagabondage poétique de l’esprit ». Situant la rêverie « à égale distance du rêve nocturne et du mythe » il propose pour cette forme d’expression particulière de l’imaginaire un rôle qui est celui d’un mécanisme d’appréhension et en même temps quelque part de distorsion ; une façon de percevoir le retentissement particulier de certaines images fortes, essentiellement de nature poétique, et de les laisser résonner en nous indépendamment de leur contexte (et parfois même, qui sait ?, en opposition à celui-ci). explique la notion d’idéologie comme un ensemble parcouru de formes fortes qui suscitent une adhésion souvent bien moins rationnelle et délibérée qu’on ne voudrait le croire, et qui trouve précisément dans la rêverie le filtre qui en tirera des images susceptibles d’être partagées. Quoique son souci soit principalement d’ordre sociologique, souligne à juste titre que la rêverie « est ce qui détache des significations convenues et en particulier rationalisées, pour ouvrir à l’aventure poétique, et ce, qu’on se situe dans le domaine littéraire, artistique, ou politique ».

Il nous semble que c’est justement à partir d’une compréhension semblable du concept de rêverie, que l’on doit pouvoir utilement rouvrir le débat sur le rôle et l’importance de l’imagination dans la création et la lecture des romans populaires, laissant de côté les vieilles interprétations réductrices et négatives du terme « rêverie » qui en faisaient un succédané de l’aliénation, pour la comprendre comme une forme particulière d’assimilation d’images de la part de l’auteur tout aussi bien que de son public. La rêverie s’éloignerait ainsi du concept de « fancy » dont parlait Elémire Zolla pour s’ériger en détecteur d’une certaine vérité, qui pour être poétique et à l’origine essentiellement personnelle, n’en est pas moins primordiale. Il suffirait peut-être de mettre à la place du concept d’idéologie tel qu’entendu par le concept de genre, pour pouvoir appliquer à l’étude de la littérature populaire cette intuition brillante que l’auteur a le mérite de présenter dans un style simple et direct, fort agréable à lire.

Vittorio Frigerio


Belphegor

Belphégor est une revue internationale arbitrée de niveau universitaire, consacrée à l’étude des littératures populaires et de la culture médiatique. Elle est ouverte à toutes les approches critiques et encourage l’interdisciplinarité et les études comparatives. La mission de la revue est de stimuler la discussion, la recherche et les contacts entre chercheurs de tous horizons dans le domaine français, anglo-saxon, italien, allemand, espagnol et lusitanien.