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Les voleurs d’eau
SILENCE n° 339, octobre 2006

Dans cet essai au sous-titre éloquent ("Les déboires marchands d’un bien commun"), Colin Ward analyse le devenir de cette ressource majeure qu’est l’eau et les diverses manières d’organiser et de concevoir sa gestion. De la protection de ses sources à sa distribution, en passant par son assainissement, tout le circuit de l’eau nous est conté, au gré de la diversité de ses usages. Trois voies principales émergent : la gestion étatique centralisée ; la gestion privatisée, confiée à des entreprises ; la gestion locale, par les communautés de riverains et d’usagers. Exemples à l’appui, c’est à une analyse comparée que se livre l’auteur, observant tous les continents en partant du principe que l’eau est un bien commun de l’humanité, qui, à ce titre, doit être accessible à tous. A partir de la, il envisage la gestion étatique comme aggravant les risques de guerres de l’eau, guerres qu’il pressent nombreuses à l’avenir. De son côté la gestion privée se révélerait onéreuse et brutale, la recherche de bénéfices se traduisant par une augmentation des coûts pour l’usager, soumis à la violence des coupures d’eau lorsqu’il ne peut pas payer. La gestion locale et décentralisée se montrerait finalement la plus appropriée : plus proche des besoins des habitants, adaptée aux usages locaux, moins soumise a la politique du porte-monnaie qui joue toujours, évidemment, en défaveur des plus pauvres. Partisan du small is beautiful, Colin Ward démontre comment la gestion de proximité lui parait finalement la moins chère, la plus équitable et la plus écologique. Elle atténue les rapports de force qui ne manqueront pas de s’accentuer dans les prochaines années, l’eau devenant une ressource de plus en plus rare, donc de plus en plus précieuse et de plus en plus convoitée, car toujours si nécessaire à la vie. Si l’excès de citations rend parfois difficile de demêler la pensée de l’auteur de celle de ses sources, il s’agit là d’un livre éclairant, au plus proche des enjeux d’aujourd’hui et de demain, qui dévoile les méandres économiques et écologiques de cette ressource a l’heure de la mondialisation.

Rodolphe Christin