Jules CLARENSON
CLARENSON Jules Alexandre Gabriel (dit Albert Puis, Fournil, le Baron, Canet, Audierne)
Né à Saintes le 31 janvier 1867, mort à Saint Jean du Maroni le 19 juillet 1927. Fils d’André et de Maria Fragniaud.
Anarchiste illégaliste, l’existence de Jules Clarenson est, selon l’expression employée par le journal La France du 18 septembre 1896, « un véritable roman criminel ». L’homme vient d’être arrêté à cette date à Montpellier en flagrant délit de cambriolage. Il n’en est pas à son coup d’essai. Le 20 décembre 1884, la Cour d’Assises de la Gironde le condamne à 3 ans d’emprisonnement pour vol et tentative d’homicide. Libéré le 6 avril 1886, il fréquente assidûment les compagnons libertaires bordelais. Mais il est à nouveau poursuivi pour vol un an plus tard. Clarenson appartiendrait à une bande de cambrioleurs écumant les Landes et la Dordogne. Il parvient à s’évader le 27 octobre 1887 lors de son transfert au Palais de Justice de Bordeaux. Interpellé à Marseille, il blesse grièvement un agent de police à coups de revolver. La Cour d’Assises des Bouches du Rhône le condamne à 3 ans de prison, peine qu’il purge jusqu’16 septembre 1891. Transféré à l’asile Montperrin d’Aix en Provence, Clarenson souffrirait d’une espèce de schizophrénie créant chez lui, selon les médecins chargés de son observation, « deux personnalité bien distinctes : l’une, l’anarchiste, en possession de ses facultés ; (…) l’autre, l’aliéné, fatalement aux prises avec les atteintes de son affection ». Il est probable que Clarenson soit un simulateur, comme Alexandre Jacob en 1900 dans le même asile. Toujours est-il que nous le retrouvons libre à Bordeaux en 1992. Il est impliqué au début de cette année dans une affaire de possession de dynamite. Malgré une ordonnance de non-lieu, la justice bordelaise le fait interner à l’asile de Cadillac (33). Il s’en évade le 22 août. Activement recherché après la rixe mortelle de Langon (33) où se tenait le 27 février 1893 une réunion libertaire (affaire Dekaetler), Jules Clarenson parvient à nouveau à disparaître. La police signale sa présence à Toulouse et à Saumur. Mais c’est à Marseille que Clarenson se réfugie. Il y fréquente les anarchistes (dont Alexandre Jacob ?) et le milieu local. Il vit du cambriolage, activité lui permettant d’assouvir sa passion du jeu. C’est dans ce cadre qu’il est arrêté à Montpellier en 1896. La justice l’envoie une fois de plus se faire soigner en asile psychiatrique. Il s’évade encore. Jusque vers 1900, il semble résider dans le Midi. Il est emprisonné un temps à la maison d’arrêt de Nîmes. Un avis de recherche est lancé à sa sortie de prison le 14 janvier 1901.
Jules Clarenson porte alors le n°277 sur l’Etat Vert des anarchistes portés disparus. Il est pourtant inscrit à partir du mois de septembre de cette année à l’Hôtel de la Clé (Paris Ve) sous le nom d’Albert Puis. C’est là qu’il projette avec ses deux compagnons marseillais, Alexandre Jacob et Honoré Bonnefoy, le vol de la bijouterie du sieur Bourdin, au 6 de la rue Quincampoix. Ce célèbre cambriolage (il a inspiré Jules Dassin pour son Film « Du Riffifi chez les hommes« ), effectué le 6 octobre 1901, rapporte environ 120000 francs à la bande dite des Travailleurs de la Nuit. Mais Clarenson commet l’imprudence de vouloir négocier à Monté Carlo un titre de rente au mois de janvier 1902. Arrêté, puis relâché et à nouveau arrêté, il est transféré à Abbeville en 1904 en attendant de pouvoir comparaître à Amiens dans le cadre du procès d’Alexandre Jacob et de sa bande d’anarchistes cambrioleurs. Contrairement à ce qu’il peut affirmer devant le jury de la Cour d’Assises, Clarenson n’a rien perdu de ses convictions libertaires. La chanson La cellule, qu’il compose en détention, constitue une véritable charge contre l’institution pénitentiaire. Elle est publiée dans le journal anarchiste amiénois, Germinal, à l’occasion du procès d’Amiens. Ce texte (voir ci-dessous) confirme également le propos inscrit dans une fiche signalétique établie en 1892 et faisant de lui un « anarchiste, libre penseur et lettré ». Le tribunal ne croit pas en revanche à la folie de Clarenson, pourtant attesté par des rapports médicaux. Il est condamné le 22 mars 1905 à 5 ans de travaux forcés. La Cour d’Assises de Laon ramène cette peine à 5 ans de prison le 1er octobre mais elle est assortie de la relégation. Jules Clarenson ne peut donc échapper au bagne. Il est embarqué le 17 juillet 1908 pour la colonie pénitentiaire de Guyane. Il parvient à s’évader en 1918 mais la police retrouve sa trace à Nice. De retour à Saint Jean du Maroni, il réussit une seconde Belle le 17 juillet 1927. Arrêté et réintégré le 19 de ce mois, Jules Clarenson meurt le même jour. Le dossier de bagne du relégué, matricule 9609, ne précise pas les conditions de ce décès pour le moins très ambigu.
SOURCES : Arch. Nat. BB18 2261 A dossier 2069 A03, Arch. Pref. Police EA/89 dossier de presse “La bande sinistre et ses exploits”, Arch. De l’Outre Mer H3671/9609 et H4362, Arch. Dep. Gironde 1M488, Alexandre Jacob Ecrits (Insomniaque 2004), Jean-Marc Delpech Parcours et réseaux d’un anarchiste : Alexandre Marius Jacob 1879-1954, thèse de doctorat, Université de Nancy II 2006.
Tags: Amiens, anarchiste, bagne, Bonnefoy, Bordeaux, casino, chanson, Clarenson, Dekaetler, fou, hôtel de la Clef, Jacob, Laon, Marseille, procès, relégation, Travailleurs de la Nuit, vol, vol Bourdin
Imprimer cet article
Envoyer par mail