Mon ami Bernard
Nous aurions pu intituler cet article : Un lecteur nous écrit. Mais Pierre Valentin Berthier n’est pas un lecteur comme les autres. Il fait partie intégrante de l’histoire de l’honnête cambrioleur en retraite dans le Berry. Il a connu Alexandre Jacob (Marius à l’époque) sur les marchés par l’entremise de Louis Briselance et de Bernard Bouquereau peu de temps avant la seconde guerre mondiale. Il a tenu par cette missive, qui confirme un milieu – celui des marchands forains – particulièrement politisés ou plutôt empreint d’un esprit social critique, apporter quelques précisions sur cet ami que fut Bernard Bouquereau pour Marius Jacob et pour lui. Où l’on apprend ainsi les turpitudes du parti communiste dans le Berry durant l’année 1936. A la suite de cet épisode, l’homme se met à parcourir foires et marchés. Pierre Valentin Berthier signale également une erreur d’orthographe commise dans la biographie de Jacob sur la personne de François Chasseigne (et non Chassaigne), que le voleur a peut-être rencontré à la prison de Fresnes vers 1927. Un grand merci à toi pour les quelques mots de ta plume libertaire attentive et toujours alerte, pour le compliment et pour ce témoignage d’amitié émouvant entre Bernard Bouquereau et toi.
Cher ami,
Vous avez fait un très beau travail ; en faisant ce livre, certes, mais surtout, à mes yeux, en poussant aussi loin, avec les difficultés que j’imagine, une telle investigation.
Une seule petite chose m’a arrêté, surpris, au cours de ma lecture, quand vous dites que, de Bernard Bouquereau, nous ne savons pas grand-chose. Vous auriez du m’en parler, car il fut un de mes meilleurs amis à Issoudun et c’est lui qui est venu me chercher à Paris quand j’étais libraire et m’a emmené en voiture à Reuilly pour assister aux obsèques de Marius.
A Issoudun, pendant ma longue maladie janvier 1933 – octobre 1935, il m’emmenait à la campagne, à la pêche, etc. C’est lui et Briselance qui m’ont fait connaître Jacob. C’est lui, avec mon concours, qui a fait éclater à Issoudun la grève sur le tas à la mégisserie Joly, grève qui s’est étendue à tout le centre de la France (les communistes qui nous traitèrent d’abord d’aventuristes, en prirent ensuite la direction, s’en attribuèrent l’initiative et nous accusèrent si bien de l’avoir sabotée que, la grève finie, Bernard ne fut pas repris chez Joly, les « cocos » s’y opposant !). Dans le même temps, Bernard me fit entrere comme reporter chez son frère René, correspondant du quotidien castelroussin, qui, abandonna Issoudun un an plus tard, me céda la place ; c’est dons aux frères Bouquereau que j’ai du d’être journaliste pendant quinze ans.
Puisque vous avez mon livre « La cité dans le tunnel » ; hélas ! épuisé sans espoir de réimpression (je vois que vous le citez), je vous signale qu’il y est fait mention de Bernard Bouquereau , d’abord page 43, puis pages 273-274, nommément.
De façon romancée, j’ai conté notre grève de 1936 dans « Chéri bonhomme », paru en 1956, probablement introuvable aujourd’hui. Le rôle de Bernard est esquissé dans celui du personnage nommé Cadet Jacquemin.
Ne croyez pas cher ami qu’il y ait l’ombre d’un reproche dans ce qui précède. C’est simplement une mise au point qu’il me semble que je dois à la mémoire d’un vieil ami – que je revois fondant en larmes quand, lors de notre première installation à Paris, en décembre 1951, il nous trouva logés à trois dans une cour vitrée, qui fut notre havre pendant plusieurs semaines ; il avait connu la misère et la retrouvait chez nous, où elle ne fut que passagère, heureusement.
Voilà, je me sens quitte !
Une dernière petite paille dans le gros bouquin à classer près des « Ecrits » : le nom de notre député(ex) devenu maire puis ministre pétainiste s’écrit Chasseigne (un e intérieur non un « a »). Que cela ne nuise en rien à un ouvrage auquel je souhaite un grand succès !
Bien amicalement
Pierre Valentin Berthier
Tags: 1936, Alexandre Jacob, Bernard Bouquereau, Berthier, Chéri Bonhomme, communistes, Ecrits, François Chasseigne, grève, Issoudun, La cité dans le tunnel, Louis Briselance, Marius Jacob, mégisserie Joly, Pierre Valentin Berthier
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