Le transporté
Nous avons mis en ligne cette chanson, interpétée par Daniel Denécheau et Patrick Denain, une première fois le samedi 18 octobre 2008. Nous ne connaissons pas son auteur. Certains ont pu l’attribuer au bagnard Miet. Elle est écrite vers 1912 et est publiée en 1924 par les soins d’Antoine Mesclon. Mais elle ne semble pas avoir connu un certain succès, les bagnards préfèrant de toute évidence entonner le Chant de l’Orapu. Les éditions L’Insomniaque l’incluent une première fois, en 2000, dans le cd accompagnant le livre Au pied du mur, anthologie de textes sur la prison, puis, en 2004 dans le cd de la réédition des Ecrits de Jacob.
Elle est donc contemporaine du séjour de l’honnête cambrioleur aux îles du Salut et, par conséquent, illustre les souffrances endurées par Barrabas-Jacob et tous les autres transportés. Si elle verse dans une vision fataliste et partiale de la vie du bagnard, elle offre néanmoins plusieurs thématiques. Les surveillants militaires deviennent ici des « chaouchs » d’origine corse, brutaux, haineux et profitant de la supériorité que leur confère leur situation. La chanson aborde aussi la faim, la fatigue, l’homosexualité, la soumission, la délation, la violence et la mort, sans oublier bien sûr ce à quoi a été condamné le bagnard : les travaux forcés.
Cette complainte, qui s’inscrit dans le contexte de critique généralisée du bagne, sonne comme une condamnation sans appel de l’inhumanité de l’institution pénitentiaire. Jean Fagot implore en conclusion une vraie peine de mort plutôt que cette hypocrite guillotine sèche. L’envoi de condamnés en Guyane cesse en 1938. Le bagne disparaît définitivement au début des années 1950.
anonyme, vers 1912
Le transporté
C’est Jean fagot qu’on me surnomme,
J’suis un ancien.
Oui, j’ai vu tomber plus d’un homme
Qu’était malin.
Maintenant que je sens que je calanche,
J’veux vous conter
Ce que j’ai vu depuis qu’sur la planche
J’suis l’transporté.
Il faut nous voir quand on turbine
A s’faire crever,
Le Corse armé d’sa carabine
Pour nous braver.
L’insulte aux lèvres, il nous bouscule.
Fatalité !
Coucher la tête sous la férule,
V’là l’transporté.
La faim qui nous poursuit sans cesse,
O sort hideux !,
Fait naître plus d’une bassesse
Parmi les gueux.
Le ventre creux fait la bourrique,
Quel sale métier !
Il vendrait son père pour une chique,
Le transporté.
Même le plus fort fait des courbettes,
C’est effrayant.
Car pour dresse les fortes têtes,
Y a le repoussant !
Pour un seul mot, on nous terrasse
Sans hésiter.
C’est comme ça qu’on se débarrasse
Du transporté.
Faut pas songer à sa misère.
Ah ! Quel tableau !
Comme tout l’monde est célibataire,
On cherche la peau
D’un gars qui bientôt s’abandonne
A volupté.
C’est pour un mâle qu’il se passionne
Le transporté.
Plus d’un forçat, quand la nuit tombe,
Triste et rêveur,
Voudrait voir s’entrouvrir la tombe
De sa douleur.
Pourquoi ainsi souffrir sans cesse ?
Humanité !
Supprim’le donc ! Vaut mieux qu’il crève !
Le transporté.
Tags: 34777, Antoine Mesclon, AP, Au pied du mur, bagne, Barrabas, Chant de l'Orapu, chaouch, Corse, Ecrits, gardien de prison, guilltine sèche, Guyane, homosexualité, honnête cambrioleur, Jacob, Jean Fagot, L'Insomniaque, mort, prison, souffrance, soumission, surveillant, travaux forcés, violence
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18 mars 2023 à 14:53
Bonjour,
J’ai récemment créé un site qui pourrait vous intéresser:
http://www.chants-de-lutte.com
Si c’est le cas, pouvez-vous dispatcher l’info?
Merci.
Jean.
19 mars 2023 à 19:10
Bonjour Jean
« Depuis le début, nous développons l’idée qu’il n’y a pas de pandémie, que toute cette histoire est une construction pour asservir encore plus les populations, qu’on appelle cette vaste entreprise, Grand Reset ou autre. », « la dictature mondiale de plus en plus affirmée », et tout le propos de la rubrique Plandemia 3 nous gène beaucoup. Les relents de complotisme et de confusion ne sont pas vraiment le bienvenue ici.
C’est dommage car ils viennent entacher la qualité des chansons reproduites dans le blog.
Nous ne cautionnerons donc pas celui-ci.