L’équipée volage de Rolland Auda


… Où l’on rencontre un certain voleur marseillais bien connu des jacoblogueurs. Fredalu a bien aimé et c’est peu dire que nous vous recommandons ce drôlatique, cet honnête et ébouriffant ouvrage.

L’Equipée sauvage

Rolland Auda

Editions Sarbacane, janvier 2013

12 octobre 1492 : « Nous retournons en Espagne » écrit Christophe Colomb depuis la Santa Maria. Son équipage et lui-même rebroussent chemin avant d’avoir touché terre et ils laissent la Niña et la Pinta se faire happer par l’esprit de la Brume Noire. Youpi !!! les peuples d’ « Amérique » n’ont pas été exterminés et le continent est devenu l’Empire Incaztèque. Ça c’est pour la base de ce roman uchronique : on a changé un événement historique et on en étudie les conséquences supposées.

En y ajoutant ici, un peu de fantastique.

Six cents ans plus tard : côté européen, une équipe de piratesses, les sept Fantasques, dirigent le Faste&Furieux, un brick qui ressemble à un champ de bataille les petits matins de beuverie. Barbe-Marie, la capitaine (elles le sont après tirage au sort, et seulement pour un temps,  c’est comme ça chez les filles) veut trouver Isocélie, une île triangulaire mais pour connaître le chemin, il faut déchiffrer des runes que seul Franck Einstein pourra déchiffrer. Franck ? Oui, son frère Albert, est un personnage secondaire dans le roman et un médiocre chimiste. Pour réussir leur quête, elles n’ont vraiment besoin de personnes mais elles croiseront le chemin de Raspoutine, Alexandre Marius Jacob, Corto Maletese, Nadar, Arthur Conan Doyle et Gaston Leroux (eux-mêmes à la poursuite de leurs personnages respectifs – le couple Sherlock Homes/Rouletabille est particulièrement amusant) et d’autres tout aussi illustres ou inventifs : le diable, le comte de Cagliostro ou Virgile Despentes.

C’est un roman d’aventures qui s’inspire souvent de l’Odyssée en donnant une vision étonnante du monde sans découverte du Nouveau Continent, sans électricité, sans assèchement des marais (le Médoc devient la dangereuse forêt gouvernée par les Amaz’oc) et sans pétrole (enfin si, mais c’est le mystère que les Incaztèques ont employé pour garder les Européens à distance, vous découvrirez cela à la lecture) et avec des inventions drôlatiques : pour gagner une bataille maritime rien de vaut une attaque de Mamies-zombies, authentiques grand-mères, couturières et Alsaciennes qu’on a rendues mortes-vivantes grâce à la technique de la zombification.

Les Sept Fantasques réussiront-elles à rejoindre leur Ithaque ? Les mamies-zombies gagneront-elles leur salut grâce à la Société Discrète et Eucharistique des Mamies-Zombies Affranchies, Rouletabille et Sherlock Holmes retrouveront-ils leurs daddy’s ?

Ne manquez pas de lire les petites interventions du narrateur et ses nombreuses mises en abyme du récit : « l’auteur n’a pas cru bon de répondre positivement à la pétition de ses personnages qui, rassemblés pour l’occasion en syndicat, ont honteusement exigé que le passage en question soit censuré, prétextant un déficit pour leur image de marque qui pourrait leur être préjudiciable au cas où ils viendraient à se faire embaucher dans d’autres romans ».

A l’abordage, putanelles ! Ne faisons pas de quartier de ces 371 pages !

Frédérique Creusot-Bouther

Septembre 2014

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