Venge-toi !
Poésie signée « L’Abruti » [J.-C. Dervieux] in la Lutte, Lyon, nº 3, 15 avril 1883.
In Gaetano Manfredonia, Libres ! Toujours …, Atelier de Création Libertaire, 2011, p.97
I
Alors que dégustant le champagne à plein verre,
Un oisif insolent se rit de ta misère ;
Alors que te volant ta seule affection,
Il pousse ton enfant dans la prostitution.
Pour te récompenser, toi qui fis sa fortune,
Il t’oblige à vider la coupe d’amertume !
REFRAIN
Prolétaire outragé, victime des bourgeois,
Quand l’heure sonnera, frappe-les, tu le dois !
Sois comme eux sans pitié, partout jette l’effroi,
Et par tous les moyens, travailleur, venge-toi !
II
Quand la grève sévit, quand pour quelques centimes
L’on voit sur le pavé des milliers de victimes ;
Alors que tes patrons se sont coalisés,
Qu’à te laisser mourir, ils sont autorisés ;
Dois-tu dans l’inaction, sur le seuil de ton antre,
De tes dix doigts crispés, te comprimer le ventre
Prolétaire affamé, etc.
III
Quand pour la liberté de parler ou d’écrire
L’on te met au secret, quand tu dois te proscrire
Alors qu’un Jacomet fouille en d’ignobles lois,
Que l’aveugle Thémis étale ses faux-poids ;
Ne va plus t’engager sur un front de bataille.
Il faut, pour triompher, dissimuler sa taille !
Prolétaire insurgé, etc.
IV
Honneur à Métayer ! admirons son courage ;
Il est mort, ce héros ! achevons son ouvrage.
Affronter le péril, tous les jours, froidement,
Étouffer la douleur jusqu’au dernier moment.
Quoi de plus éloquent pour plaider une cause,
Qu’un pareil dévouement qui librement s’impose !
Prolétaire immolé, etc.
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