Jacob : la BD !
Les projets de bandes dessinées sur l’honnête cambrioleur ne manquent pas. Peu aboutissent toutefois. En 2006, Romain Louvel croquait les Souvenirs d’un révolté. L’ouvrage, auto-produit, s’arrête à ce que la presse avait nommé « le drame de Pont Rémy » en 1903. Il manque hélas la fin, c’est-à-dire la fuite dans la campagne picarde du voleur anarchiste puis l’arrestation à Airaines et la conduite à la prison d’Abbeville. Dix ans plus tard, Gaël et Vincent Henry ont imaginé, ont visualisé d’une manière globale la vie de labeur des Travailleurs de la Nuit. On aurait pu craindre un douteux et fallacieux amalgame en feuilletant le catalogue des éditions Sarbacane annonçant pour le mois de janvier 2016 l’histoire d’un « personnage hors norme qui tient tout à la fois d’Arsène Lupin, de Robin des Bois et de Papillon » ; et pourtant il n’en est rien. Bien au contraire, en 144 pages d’un dessin épuré, presque naïf, les deux auteurs parviennent à scénariser une histoire complexe sans tomber dans les éternels clichés de l’aventurier. C’est brillant, c’est drôle, c’est tragique et politique.
L’homme criminel devient anarchiste ; ses actes sont autant de reprises de possession au grand dam de ses victimes, toutes issues des rangs de la bourgeoisie, du clergé ou de la Grande Muette. Mais il ne fait pas bon crier « Ni Dieu ni Maître » ! Il ne fait pas bon non plus de s’attaquer à la propriété privée, à ses symboles et à ses sectateurs. La France de la Belle Epoque a peur ; les grandes feuilles à cinq sous – Le Petit Journal, Le Petit Parisien, etc. – vendent de l’insécurité à qui mieux mieux et c’est au bagne que la République envoie crever ses vaincus de guerre sociale. Thémis ne fera aucun cadeau à Alexandre Jacob que l’on suit depuis son embarquement sur les bateaux de la Compagnie des Messageries Maritimes à Marseille. Il va payer très cher son entreprise de démolition publique. C’est l’histoire vraie d’un honnête cambrioleur qu’ont superbement croquée ici Vincent et Gaël Henry. C’est brillant, c’est drôle, c’est vivant, c’est une leçon d’histoire de l’illégalisme en image qui ne devrait pas tarder à atterrir chez votre libraire indépendant préféré et ailleurs … et donc dans votre bibliothèque. Jacob : la BD recommandée par toutes les pinces monseigneur … et par le Jacoblog ! On attend impatiemment la suite.
Alexandre Jacob journal d’un anarchiste cambrioleur
Scénario : Vincent Henry
Dessin : Gaël Henry
Format 20,5×28
144 pages en bichromie
Janvier 2016
21,50€
Tags: Alexandre Jacob journal d'un anarchiste cambrioleur, bande dessinée, Editions Sarbacane, Gaël Henry, Romain Louvel, Souvenirs d'un révolté, Vincent Henry
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