L’homme libre
« Tout jeune, le virus de justice m’a été inoculé, cela m’a valu bien des désagréments. Aujourd’hui encore, au déclin de la vie, la moindre injustice me heurte et réveille en moi le Don Quichotte de mes jeunes printemps. » 1954
Il était Georges, Attila quand il pillait les églises de France et d’ailleurs ou encore Barrabas dans les camps de travaux forcés guyanais. L’anarchiste de la Belle Époque a fini d’expier ses crimes depuis le 30 décembre 1927. Presque un quart de siècle à payer ses horribles atteintes à la propriété. Prématurément vieilli au régime de la géhenne, il aurait perdu ses repères ? Rien n’est moins faux. Alexandre Marius Jacob, « cambrioleur en retraite », honnête marchand forain au curriculum vitae particulièrement chargé, a quarante-huit ans. Le bagne ne l’a pas brisé. Il est l’homme libre et a encore des Bastilles à faire tomber, des choses à dire et un amour à assumer. Prison, Josette, anarchie.
Les Éditions de L’Insomniaque ont publié en 2000 une compilation des Écrits de Jacob en trois petits volumes dans leur collection À couteaux tirés. Le premier, Travailleurs de la nuit, reprenait la fameuse déclaration Pourquoi j’ai cambriolé ? parue en mars 1905 dans le journal libertaire amiénois Germinal. On pouvait aussi y lire les Souvenirs d’un révolté, dernier et seul chapitre des mémoires du voleur sur son arrestation le 22 avril 1903. La Pigne a réédité en 2020 Extermination à la française qui rassemblait quelques lettres bagnardes du matricule 34777 à sa mère Marie. À bas les prisons, toutes les prisons, le dernier de ces trois petits joyaux, finissait de montrer, en évitant de tomber dans le piège hagiographique, combien l’anarchiste est resté cet éternel subversif, luttant avec ses moyens contre un « Veau d’or plus puissant que jamais »[1] parce que « le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend. »[2] De vivre, d’aimer et de mourir aussi. Prison, Josette, anarchie revient à la source non tarie de cette révolte. Alexandre Marius Jacob, 1879-1954, est l’homme libre et sa plume, celle qui n’émousse pas les coffres-forts, n’a rien perdu de sa force, de son cynisme, de sa causticité et de sa justesse politique. Le « jeune vieux »[3] est en verve même lorsqu’il est au bout d’un « voyage » – sa vie de marchand forain – commencé après avoir honnêtement émargé au travail salarié dans la capitale jusqu’au milieu des années 1930. À paraître très prochainement et en souscription très bientôt aux Éditions de La Pigne.
[1] Alexandre Jacob, lettre à robert Passas, 24 janvier 1954 »
[2] Alexandre Jacob, déclaration « Pourquoi j’ai cambriolé ? » dans Germinal, n°11, du 19 au 25 mars 1905.
[3] Robert Passas, carnets, archives privées, probablement vers 1977.
L’homme libre – Prison, Josette, anarchie
Éditions de La Pigne
176 pages, 12 x 20 cm
Table des matières :
L’homme libre préface Jean-Marc Delpech
Une grâce… Louis Roubaud
Par droit de compétence Jacob, le bagne, Ernest Lafont
J’aurais plutôt honte d’avoir honte Lettres à Jean Maitron
Cambrioleur en retraite Lettres ouvertes à Georges Arnaud et au procureur de Marseille
Lettres à Jo… et quelques autres
Post Mortem garder le souvenir de ce parfait honnête homme
Pour en savoir plus bibliographie
La couverture de L’homme libre ici présentée n’est bien évidemment qu’une ébauche ; elle risque fort de varier et d’être embellie et améliorée.
Tags: Alexandre Jacob, Alexis Danan, CIRA Marseille, Editions de La Pigne, Ernest Lafont, Georges Arnaud, Jean-Marc Delpech, Josette Passas, lettre au procureur de la république, Louis Roubaud, Louis Rousseau, Marius Jacob, Marseille, Paris, Reuilly, Robert Passas
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1 août 2022 à 12:04
vous écrivez : « Prématurément vieilli au régime de la géhenne, il aurait perdu ses repères ? Rien n’est moins faux » ce qui est une manière de dire que rien n’est plus vrai.
La double négation peut être piégeuse
Amitiés
Christian
3 août 2022 à 15:30
c’est vrai si on ne considère que cette phrase. Mais elle s’intègre dans l’explication des souffrances subies au bagne.
Merci de la remarque Christian.