Aphorismes d’un été jacobien
25 juillet 2016 par JMD
Le chapitre 6 du livre du Docteur Rousseau aborde logiquement le thème de l’évasion après l’analyse plus que critique des processus de normation faisant du bagnard un rouage interchangeable parce que périssable. Eradiquer toute velléité d’opposition, briser les énergies, le bagne est un monde violent et totalitaire qui n’offre aucune perspective de régénération. L’ogre carcéral se nourrit de l’infortune du condamné qui n’a d’autres alternatives pour s’y soustraire que de crever ou d’embrasser la chimérique Belle. 95% des évasions échouent, nous dit en 1930, Dieudonné, forçat anarchiste, ancien membre de la bande à Bonnot, lui-même évadé en 1926[1]. Pourtant, l’infime petit nombre de réussites suffisent à entretenir le mythe, à relever l’espoir du détenu prêt à braver une faune hostile, une végétation particulièrement inhospitalière, une mer houleuse et infestée de requins. Si Louis Rousseau insiste sur les obstacles qui mettent en échec le fuyard, ce n’est que pour mieux stigmatiser « de remarquables exemples d’énergie ». Loin de condamner l’acte, il donne de nombreux exemples d’évasion, utopie libératrice confinant à l’obsession. Les motivations de l’évadé répondent à la souffrance endurée et mettent en relief une espèce « d’instinct de conservation ». Mais, ici, pas de narration dramatique et prodigieuse, à la manière d’un Gaston Leroux ou d’un Henry Charrière[2]. Le médecin a choisi d’exposer un phénomène largement plus complexe qu’il n’y parait et qui fait « partie du système pénitentiaire ». Lire le reste de cet article »
On ne va pas rechigner sur une aussi sympathique recension ; on ne va pas pinailler sur les quelques errements historiques commis par le père Noël dans les colonnes du n°52 de Siné Mensuel, avril 2016. Tout au plus, pourrions-nous relever l’oubli d’Alexandre Jacob l’honnête cambrioleur paru à l’Atelier de Création Libertaire huit ans plus tôt. Une Bd, deux livres ? Trois raison d’aimer Jacob sur le sable chaud ou ailleurs. Et sous les pavés, se lèveront des armées de Travailleurs. Vive les enfants de Cayenne et du Gloupier. Lire le reste de cet article »
Le vol commis par Joseph Ferrand à Saint Quentin au début de l’année 1901 peut paraître intéressant à plusieurs titres. Nous ne savons pas qui accompagnait le cambrioleur anarchiste. Quatre ans plus tard, lors de la 4e audience du procès d’Amiens, l’examen de cette effraction met en avant un mode opératoire particulièrement efficace. Il y a ainsi une volonté affirmée de masquer le forfait commis en bloquant de l’intérieur la porte d’entrée de la maison de Madame Noë. Le pactole n’est pas au rendez-vous dans cette arche provinciale malgré la présence d’un appétissant coffre-fort et la brigade des Travailleurs de la Nuit a dû alors se diriger sur une autre ville à visiter. Amiens n’est qu’à 85 km à l’ouest de la sous-préfecture de l’Aisne ; Laon à peine à 45. La bande Jacob n’a-t-elle enfin œuvré qu’une seule fois dans cette ville prospère connaissant une véritable explosion urbaine ? Cela nous semble d’autant moins probable que la Picardie fut un terrain privilégié pour les opérations de déplacement de capitaux commis par les illégalistes et ce à moins de 200 km de la capitale. Lire le reste de cet article »
Rares, extrêmement rares sont les feuilles qui ne tombent pas dans le panneau. Rares, extrêmement rares sont les papiers ne versant pas dans le fallacieux amalgame et affirmant haut et fort, comme une vérité journalistique absolue, comme un axiome, un dogme, pour le lecteur à édifier que Maurice Leblanc s’est inspiré d’Alexandre Jacob pour créer son gentleman cambrioleur. Faire table rase d’une réalité objective, la nier avec force de mauvaise foi le cas échéant quand elle devient trop évidente, lui opposer comme argument imparable la chronologie, la lupinose participe de la reconstruction historiographique des deux personnages. Elle est devenue si endémique que nous ne pouvions que saluer les lignes signées Eléonore Sulser et parues le 15 août 2009 dans le Temps. L’article évoque la création en 1905 d’un héros de papier dont la renommée fut telle qu’elle finit par irriter son créateur. Vous pouvez chercher ; vous pouvez vous y reprendre à deux, à trois, à dix fois, à aucun moment vous n’y trouverez une quelconque allusion à l’illégaliste anarchiste jugé à Amiens du 8 au 22 mars 1905. L’argument chronologique s’efface devant la modernité de l’écriture d’un dandy assumant une œuvre de commande. Nous savions l’helvète honnêteté malléable en fonction du volume bancaire, nous constatons qu’elle se niche innocemment dans les colonnes du quotidien suisse édité à Lausanne. Lire le reste de cet article »