Nous pouvons ouïr un extrait des Conseils à un pègre de Léon Pélissard dans la saynète Une réunion de la bande qui figure dans le premier des deux cd inclus dans les Ecrits de Jacob en 1995. La réédition de 2004 permet à Daniel Denécheau et Patrick Denain d’interpréter magistralement un texte dans lequel l’auteur donne une leçon de vol social et politique. La chanson est publiée une première fois par le journal anarchiste amiénois Germinal dans son numéro 12 en date du 26 mars au 09 avril 1905. Lorsque la feuille libertaire parait, le procès des Travailleurs de la Nuit est clos depuis quatre jours. Pélissard fait en outre partie des accusés expulsés de la salle d’audience du tribunal depuis l’houleuse séance du 14 mars. Il y a donc tout lieu de penser que c’est à Bicêtre, la prison d’Amiens, que le complice d’Alexandre Jacob a écrit cette chanson qui participe pleinement de la tradition des goguettes, ces espaces où l’ouvriers venaient boire, danser et chanter sur des airs entraînants et des textes politiquement incorrects. Lire le reste de cet article »
Olivier est un bon copain. Accessoirement, il philosophe auprès de la jeunesse lycéenne de Meurthe et Moselle. L’idée d’interviewer ce creuseur d’encéphale n’était, à ce titre, point déplaisante. Olivier court aussi. Il fait du karaté et du tennis … mais du sportif accompli nous n’avons cure. En revanche, l’homonyme de Félix Bour, cause, converse, discourt, baragouine, jacte, discute, bavasse, papote, jacasse et dialogue et fait la causette de fort belle manière. Et, ce qui ne gâche rien au propos de cet ancien éleveur de poules, il ne citera pas, à la manière de certains, Jean-Baptiste Botul pour impressionner son auditoire et ne professera pas un quelconque et consumériste anarchisme pour ouvrir une non moins quelconque université populaire. C’est enfin de la matière à réflexion et à débat qu’Olivier a bien voulu ici nous donner en répondant à nos dix questions autour d’un honnête cambrioleur. Lire le reste de cet article »
Tomalu a cédé sa place à Fred qui prouve de la sorte qu’elle manie aussi bien la plume pleine d’encre que celle pleine de peinture à la huile. Tomalu déteste les livres qu’il nous présente ; Fredalu c’est le contraire et a de toute évidence bien aimé La bande à Bonnot contre les Brigades du Tigre. Un ouvrage à glisser sous le sapin … ou ailleurs, parce qu’il est fortement recommandé aussi pour ceux qui ne portent plus de culotte courte et parce que c’est pas encore Noël. Lire le reste de cet article »
Tel un beau pléonasme, L’Insomniaque pourrait se lever tôt et émarger à l’esclavage salarié, à la suite cette Belle France, qu’avait si bien décrite Darien en son temps et qui, aujourd’hui, travaille plus pour gagner plus. Mais le travail tue ou rend libre. C’est selon. L’Insomniaque entend bien briser, à la manière des luddistes du début du XIXe siècle, les chaînes de l’oppression sociale et culturelle qui fait de l’individu lambda un paponnesque consommateur. Un but évident : ne pas se taire et répondre à l’injure permanente faite au droit de vivre. Depuis 1993, ses livres distillent un chouette savoir, un savant bonheur, une lumineuse et intelligente subversion. Des artisans de la lettre, un point d’honneur à ne produire que des bouquins pas chers et de qualité, et surtout une intense jubilation à tenir entre ses mains, en 1995, l’indispensable ouvrage, réédité neuf ans plus tard. C’est peu dire que la sortie des Ecrits d’Alexandre Marius Jacob, sa réédition et les trois déclinaisons de la collection A Couteaux Tirés permettent d’entrevoir autre chose qu’un singulier voleur distillant, sans parcimonie aucune, des coups plus fameux les uns que les autres. La nouvelle sortie, ce mois de septembre, des Travailleurs de la Nuit, petit opus réunissant la déclaration Pourquoi j’ai cambriolé ? et les Souvenirs d’un révolté dans la collection Petites Insomnies, était l’occasion, pour le Jacoblog, de poser dix petites questions aux Insos de Montreuil. Lire le reste de cet article »
Où il est exposé que l’anarchie permet « la reconstruction d’une identité sociale » et brise l’isolement carcéral en autorisant la solidarité de groupe. 12e épisode.
Chapitre 2 : Les codétenus et la propagande anarchiste
Nous nous intéresserons ici à la propagande effectuée par les anarchistes auprès des codétenus. Dans un premier temps, nous verrons quel rôle joue l’idéologie dans la création de l’univers social de survie des transportés anarchistes. Ensuite nous verrons quelles sont les différentes formes de propagande utilisées à travers les témoignages que nous avons pu recueillir. Lire le reste de cet article »
Où il est narré que la propagande par le fait a envoyé un bon petit paquet d’anarchistes crever de l’autre côté de l’Atlantique, avec le bagne pour horizon. 6e épisode.
Première partie : Les anarchistes et l’appareil répressif
Nous souhaitons développer ici plusieurs questions en rapport avec la situation imposée au groupe que nous nous proposons d’analyser. Afin de circonscrire notre objet, il nous semble important d’aborder le thème de l’idéologie anarchiste, car la répression qui s’exerça contre ses militants en France, puis sur leur lieu d’expiation en Guyane, s’y trouve directement liée. Nous chercherons dans quels cadres idéologiques et politiques se sont inscrits les actes de propagande anarchistes, pour lesquels certains des transportés anarchistes que nous avons identifié furent condamnés. Nous montrerons également comment toute une structure répressive s’est mise en place pour anéantir cette forme de réaction dirigée contre toute forme d’autorité et plus particulièrement contre l’Etat. Lire le reste de cet article »
La longue saynète Le Marché débute par la rencontre, jouée par l’équipe de L’Insomniaque en 1995, entre le vieux Marius et le jeune Robert Passas, venu à vélo le visiter. Elle met en relief la vie pas si tranquille que cela de celui que d’aucuns aimeraient bien imaginer comme un ermite reclus. S’ensuivent alors les émouvants témoignages de ce dernier, décédé un an après l’enregistrement, et de Pierre Valentin Berthier. Le livret de présentation du deuxième cd des Écrits présente ces deux interventions orales comme un ultime hommage à Marius. L’ancien instituteur de la Drôme déclare avoir toujours froid à l’évocation de son ami disparu. Le second dit l’implication de Jacob dans l’illégalisme, narre et commente les derniers jours du vieux marchand forain au mois d’août 1954 pour mieux montrer son admiration pour celui qui « a refusé de laisser au destin le choix de sa dernière heure. Telle fut cette personnalité unique, tel fut cet homme formidable« . Lire le reste de cet article »
Une Bande Annonce. Une BA … ou un teaser. Franglais ou culture mondialiste, on s’en fout carrément. La BA sert de toute façon et de toute évidence à capter l’attention et à donner envie de voir le produit fini. Celle-là réussit parfaitement son coup même si on s’est gaussé un peu, un petit peu de l’inversion patronymique qu’on l’on trouvera sur le site mère. You Tube est la matrice and you are watching Big Sister.
Olivier Durie réalise un docu-fiction, un truc très à la mode, sur l’honnête cambrioleur. Les films Grain de sableont produit la chose qui, si la BA est conforme, pourrait s’avérer fort intéressante. Pourtant, nous avons commencé par un bon éclat de rire : un vieux à moustache et en marinière. Une fin de vie et des flash back en perspective. Le papy s’affaire à son bureau. Pour la dernière fois peut-être, histoire de faire défiler le film (sic) de sa vie ?
Gros plan sur une pile de journaux. Il y a Germinal. La feuille anarchiste a été trafiquée pour que l’on puisse y voir un beau Jacob caricaturé. Et l’honnête homme se met à déclamer devant des jurés ébahis, atterrés et scandalisés que Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend ! Là, la paupière s’ouvre en plus grand ; l’intérêt est d’autant plus capté que nous notons l’originalité de l’idée. Jacob en dessin animé : fallait y penser.
Puis on assiste à quelques minutes de démonstration théorique et pratique de l’illégalisme anarchiste. Là est l’originalité réelle. Les vrais fausses images d’époque montrant des manifs et des bourgeoises se promenant sur les boulevards, les scènes où Jacob et ses complices cambriolent, fracturent une porte, un volet, celles où les voleurs courent devant un danger supposé, la contrebasse à la main ne font finalement que rythmer le récit. Mais elles suggèrent que la Belle Époque ne l’était pas vraiment. Le récit semble surtout éviter l’insupportable cliché de l’aventurier où l’idée politique ne sert que de prétexte a postériori, de paravent ou de mauvais décor d’arrière scène. Prometteur. Alléchant. On attend d’avoir la suite. On aimerait bien la voir très vite. Bon film ? Bonne BA en tout cas. Prochainement sur les écrans. Enfin les bons.
Peu de plumes nationales sont venues prêter main forte aux camarades picards soutenant l’action des Travailleurs de la Nuit jugés du 08 au 22 mars 1905 au palais de justice d’Amiens. Avec Le plus voleur des deux, Albert Libertad donnait, dans le n°11 de Germinal, une vision duale d’un procès où la justice sociale n’a pas vraiment le droit de cité. L’article Voleurs et volés, dans le même numéro de cette feuille anarchiste, reprend lui-aussi le principe d’une opposition entre la majorité asservie et la minorité possédante se rebellant sous les traits de l’illégaliste Jacob. Mais la confrontation, au regard de l’actualité internationale, et en particulier des évènements révolutionnaires russes, ne peut être que violente … et porteuse d’espoir. Le ton se fait même messianique, l’auteur, un dénommé Souvarine, prophétisant en conclusion « une aurore nouvelle (…) où il n’y aura plus ni juges, ni volés, ni voleurs ». Lire le reste de cet article »
Une chanson, ça va forcément à l’essentiel. Une chanson, ça multiplie les stéréotypes plus ou moins heureux lorsqu’il s’agit de décrire un groupe social. Avec Quoi le gaz ?!, le groupe Les Plumeux rend bien évidemment hommage à l’auteur d’un texte initialement intitulé Les Pauvres. Plume La Traverse l’a enregistré en 1978. Le chanteur québécois dresse un inventaire des tares sociales qui caractérisent ceux d’en bas. Et qu’elle soit de France ou d’ailleurs, la horde des traîne-misère ne peut espérer s’arracher à son triste sort tant celui-ci est abrutissant. Le texte original se termine alors par la dénonciation du rôle moderne de la télévision, annihilatrice de révolte en utilisant le temps de cerveau disponible. Lire le reste de cet article »
Laurent Gallet souffre d’un trouble obsessionnel compulsif. Il fouille, il épluche … il compulse. Comme il est historien, il démonte et analyse les mécanismes. Il restitue aussi et surtout les faits. Et c’est tant mieux. Tant mieux pour nous qui attendons avec une impatience non dissimulée ses prochains articles sur Antoine Cyvoct. Tant mieux pour l’histoire du mouvement libertaire. Tant mieux pour la connaissance du bagne de Nouvelle Calédonie. Car si l’option positive de l’histoire de la colonisation a vite fait de reléguer (sic) les pénitenciers de Guyane dans les limbes de l’oubli, l’alzheimer commémoriel s’embarrasse encore moins des drames qui se sont joués sur le Caillou. L’étude de Laurent nous apparait ainsi bigrement prometteuse et ses réponses à nos dix petites questions sur le premier martyr de l’anarchie ne manquent pas d’aborder la propagande par le fait et, bien sûr, l’inénarrable lupinose. Vive les enfants de la Nouvelle ! Lire le reste de cet article »
Nous avons dans un précédent billet évoqué « L’erreur de Jacob« , article de Victor Méric paru dans le n°23 du Libertaire (du 23 au 30 avril 1905). A cette date, le procès des Travailleurs de la Nuit est clos depuis un peu moins d’un mois. Méric, tirant une espèce de bilan politique de la comédie judiciaire d’Amiens, montre que le débat sur la question du vol n’est toujours pas close chez les anarchistes. Le journaliste utilise ainsi la colère imaginaire de Jacob, déçu et dépité de la stérilité dialectique de ses actes illégalistes, pour stigmatiser les pourfendeurs de ceux qui, au nom du droit naturel à l’existence, usent de la pince monseigneur ou de la planche à faux billets. La répétition du mot grave sonne ainsi comme une allusion évidente, une charge à peine voilée contre le « pape de la rue Mouffetard ». C’est cet article qu’interprète la troupe des amateurs de L’Insomniaque dans le premier morceau du deuxième cd des Écrits de Jacob parus en 1995.
P49-54 :« Tous les anarchistes sont dans l’illégalité. »
Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend.
Marius Jacob à son procès, 1905
Outre le terrorisme, l’illégalisme est l’autre idée reçue qui affuble l’anarchisme. Elle n’est pas fausse, mais tout illégalisme n’est pas anarchiste. Et tout anarchiste n’est pas forcément illégaliste. Il ne faut pas non plus oublier que ce qui est illégal en Corée du Nord, en Birmanie ou en Arabie Saoudite, ne l’est pas forcément en France ou ailleurs, ainsi que d’une époque à l’autre. Des illégalistes libertaires pratiquant la contraception ou l’avortement à un moment où les lois l’interdisent en France sont en réalité des précurseurs vis-à-vis de la législation actuelle. Lire le reste de cet article »