Archive pour la catégorie ‘Iconographie’
Portraits de Bakounine par Nadar
Parmi les portraits les plus connus de Bakounine (dont on trouve une belle collection, et avec une bien meilleure résolution, ici) figurent ceux que le photographe français Nadar (de son vrai nom Gaspard-Félix Tournachon, 1820-1910) fit du révolutionnaire russe. De fait, il existe deux de ces portraits : celui qui figure ci-contre et celui que j’ai ajouté ci-dessous. Ils se distinguent l’un de l’autre par un léger changement de pose du modèle entre les deux clichés. La seule question qui demeure obscure est celle de savoir à quel moment la photographie fut prise. Sur Internet, j’ai trouvé les dates de 1860 (ce qui est impossible, puisqu’à l’époque, Bakounine se trouvait en Sibérie) et de 1865 (ce qui n’est pas possible non plus, pour des raisons qui apparaîtront plus loin), mais aussi celle de 1863 (hypothèse qui me semble la plus vraisemblable). Lire la suite de cette entrée »
Un portrait italien de Bakounine
Misha Tsovma m’a transmis ce portrait de Bakounine. Il semble qu’il soit attribué au peintre italien Plinio Nomellini. Celui-ci est un représentant d’un courant néo-impressionniste proche du pointillisme, le divisionnisme, fondé par Seurat en 1884. Si j’en crois wikipedia, il s’agissait pour les peintres de ce courant d’appliquer sur un support de petites taches de couleur pure, de telle sorte que le mélange soit produit dans la perception du spectateur et que le maximum de luminosité soit ainsi atteint. Je signale ces éléments d’histoire de l’art aussi parce que réaliser un portrait divisionniste d’un auteur qui fit à plusieurs reprises l’éloge paradoxal de la division me semble parfaitement approprié.
Comme d’autres portraits de Bakounine, celui-ci a donc été peint, non pas d’après modèle, ni même d’ailleurs d’après photo, mais d’après l’idée que son auteur se faisait du révolutionnaire russe. Après tout, c’est aussi le cas des deux bustes de Korolev dont j’ai parlé dans de précédents articles (ici, et là), mais aussi, à ma connaissance, d’au moins un tableau russe qui représente l’arrestation de Bakounine d’une manière tout à fait fantaisiste.
On pourrait d’ailleurs, me semble-t-il, partager l’iconographie bakouninienne en trois catégories, qui correspondent à autant de périodes. Tout d’abord les portraits effectués de son vivant (photographies, dessins, peintures), et qui relèvent souvent davantage du document que de l’œuvre d’art. Ensuite ceux qui ont été réalisés dans les décennies qui ont suivi sa mort par des personnes qui ne l’ont pas côtoyé et qui ont davantage peint l’idée qu’ils accolaient au nom de Bakounine que le révolutionnaire russe lui-même. Le portrait de Nominelli entre dans cette catégorie, mais c’est aussi le cas, à mon avis, des deux bustes réalisés par Korolev. Enfin, depuis les années 60, on voit réapparaître des portraits de Bakounine, ce qui coïncide avec un regain d’intérêt pour l’anarchisme et son histoire, mais aussi à la plus large diffusion des documents photographiques : les portraits de cette période, réalisés d’après photo, ont en même temps souvent une coloration contemporaine qui indique qu’à travers Bakounine, c’est l’anarchie, telle qu’elle est perçue aujourd’hui, qui est peinte. J’en donnerais quelques exemples dans de prochains articles de cette nouvelle rubrique.